Roman : La mystérieuse robe blanche (19)

Publié le par M. P.

Roman :
               La mystérieuse robe blanche
                                         

                                            Martine POUTOU

19

C’est là qu’il rêvassait, sous la lumière vaporeuse, dans le chambard des oiseaux qui cherchaient quelques graines ou strobiles à becter.

Il prenait le temps de vivre et c’était un luxe inouï. Vacances, métaphore de liberté !

Lorsqu’il lui arrivait de se lever plus tôt, il allait flâner sur les chemins.

Avant même que l’aurore naisse, il partait, guettant l’horizon porteur d’un nouveau jour.

Se colorant de teintes mauves et roses, les premières lueurs du levant l’époustouflaient.

Il s’épanchait toujours sur cet instant magique, le ramenant à l’origine de l’univers, au mystère de la création.

Au sortir du bois, quand la lande s’allume, ouverte sur l’immensité, le décor sauvage qui vient bouleverser vos sens, vous bouscule et vous paralyse sous des tons moirés aux effluves ambrés.

Dans l’ivresse démentielle de ces lieux sublimes et odoriférants, il s’appropriait le monde.

Et puis, soudain, jaillissaient les premiers rais.

Alors, la chaîne montagneuse offrait son empyrée, laissant poindre ce fabuleux miracle !

La naissance du jour !

Du sommet de la lande surplombant les coteaux, il observait le ciel.

Il contemplait la beauté de ce dais dans lequel il aimait plonger son regard, devinant le vol des hirondelles pérégrinant dans la splendeur naissante de l’aurore.

Sous la lune gibbeuse, le jour était venu, réveillant les plaisirs surannés.

De l’été, s’évaporait un air de liberté.

De ce temps suspendu, il voulait graver l’instant.

L’aurore encore timide enjambait maintenant la plaine insolente.

De ses mains frêles, elle en dessinait les contours.

Il s’imprégnait d’un bruissement de feuilles, d’un hululement, de l’arôme hespéridé d’un vent léger, d’une chorégraphie unique au monde d’une terre cambrée propice à la moisson.

Dans le silence envoûtant de ce matin léger, outre le plaisir éprouvé à s’évader, cette communion sensuelle avec la nature venait de le combler, le remplissant d’amour.

Dans un coffret de souvenirs, l’émergence de trésors ataviques refaisait doucement surface.

 

(A suivre)

 

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