Roman : La mystérieuse robe blanche (33)
Verrait-elle seulement cet enfant, avant d’aller rejoindre son homme dans les nues paisibles et légères de l’au-delà ?
Elle n’en savait rien. Mais peu importait !
Elle voulait profiter de chaque instant, se disant qu’il s’agissait peut-être de son dernier jour de vie.
Elsa et Tédéric flottaient dans les délices de la volupté, bercés par le rythme d’un andante parfait.
Et cela suffisait à la rendre heureuse.
Oui, elle avait su trouver la force de vivre encore un peu, Lison !
Juste le temps de connaître ce petit être doux et fragile.
A sa naissance, le zéphyr, dans une envolée ludique, avait envahi la maison d’une pluie de fleurs.
On entendait alors la comptine du vent chanter par la fenêtre.
C’était le 19 mars, jour de la Saint Joseph.
Là, où certains auraient pu déceler une coïncidence, elle, savait qu’il s’agissait d’un cadeau du ciel et ça la réconfortait, alors même qu’elle sentait sa vie basculer dans les méandres de l’Olympe.
Lorsque la petite famille rentra au bercail, son émotion était palpable.
- Yanou, je te présente ta grand-mère !
Chuchota Tédéric dans l’oreille de son fils.
Juste assez fort pour que sa grand-mère l’entende.
Les larmes lui vinrent aussitôt, avant même qu’elle ait eu le temps de prendre ce petit que Tédéric lui confiait.
Ses gestes malhabiles, ajoutés à l’émotion intense qui venait de l’envahir, lui donnait peu d’assurance.
De par l’insistance immodérée de son fils, elle prit l’enfant dans ses bras, et une larme de joie coula doucement le long de son visage triste.
Il lui arrivait souvent de passer de longs moments à épier les mimiques attendrissantes de cet adorable bébé.
Son sommeil passait de quelques sourires d’ange à une moue dubitative.
Et, lorsque ses grands yeux candides s’entrouvraient, éblouis par la lumière vive du printemps, on voyait battre de longs cils fourbis de rimmel noir au bord de ses paupières lasses.
L’innocence et la pureté de ces petits êtres en devenir est si touchante que personne ne peut être insensible à la candeur bouleversante qu’ils dégagent.
Cet enfant ressemblait à sa mère, mais au travers de ses expressions, Lison revoyait son père au même âge.
Elle se souvenait alors d’un autre temps où elle l’avait couvé des yeux de la même façon.