Roman : "Au cœur de la tempête" (33)
Elle n’arrivait plus à déglutir, l’angoisse obstruant sa gorge. Elle avait soigneusement pensé ses propos envers Joël. Il était tellement imprévisible qu’elle pouvait s’attendre à toutes réactions plausibles de sa part.
Elle avait compris comment il fonctionnait.
Si elle avait le malheur de se montrer trop enjouée, si son bonheur ne venait pas de lui, il était capable d’agressivité au point d’atteindre de nouveau son moral déjà bien obéré.
Le stress l’avait empêchée de manger. Étonnamment, il n’en avait rien dit.
Toutefois, la joie n’avait pas semblé le traverser. Elle en connut les conséquences le lendemain, quand il partit travailler.
Afin de n’ouvrir à personne, elle serait désormais enfermée jusqu’à son retour.
Ils iraient faire leurs courses le matin si besoin. Ils ne sortiraient uniquement que les jours de repos de Joël, pour la simple et bonne raison qu’il était parfaitement imprudent que Candice ouvre la porte au premier venu, ceci en attendant qu’il installe une sécurité :
- C’est pour te protéger, mon amour ! Avait-il insisté, rappelle-toi ce qui m’est arrivé il y a un an ? Depuis, je suis peut-être toujours en danger et mon devoir est aussi de te protéger. Il ne faut prendre aucun risque par les temps qui courent …
Un mois plus tard, la situation était inchangée, si bien qu’elle restait enfermée de 15 heures jusque tard dans la nuit.
La protéger d’un éventuel danger ?
Fallait-il réellement y croire ?
Elle doutait de plus en plus de cet amour qui lui semblait malsain. Ce tempérament cyclothymique devenait infernal et indéniablement insécurisant.
Ce manque d’ouverture d’esprit et l’indélicatesse dont il faisait preuve commençaient à l’insupporter.
Lorsqu’il lui arrivait de penser à sa vie d’avant, Candice en avait les larmes aux yeux. Comment avait-elle pu en arriver là ? Autrefois, elle chantait tout le temps, elle se satisfaisait de tout et de si peu. L’enfance est un pays que l’on n’oublie jamais, mais vers lequel il nous est impossible de revenir, à moins de retourner sur le chemin des souvenirs.
Mais la nostalgie du passé comprimait son cœur, accentuant la douleur activée par ses émois, tous ses sens en alerte étant martyrisés. Elle avait une vision amère des choses et surtout d’elle-même. Son image, presque étrangère, s’était ternie. Les jours de pluie, elle se trouvait médiocre et inutile, bonne à rien.
Elle luttait constamment contre l’ineptie.
Elle n’arrivait plus à mettre de l’ordre dans son esprit.
Elle était déboussolée.
Si ces rituels propitiatoires lui convenaient, aucun ne la comblaient de ce réconfort salutaire et enveloppant auquel elle prétendait.
Elle n’aspirait qu’à vivre des moments de paix.