Regards philosophiques (216)
Thème :
« Penser ou agir, faut-il choisir ? »
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► Il faut peut-être définir ce qu’on entend réellement par « penser ». Les spécialistes sont d’accord pour dire que les animaux pensent. Si je prends une meute de chiens qui suivent une proie, il y en a qui suivent la bête et d’autres qui coupent, en anticipant. Donc, cela nous pose une autre question : est-ce qu’on peut penser sans agir ? Pour cela, il faut vraiment définir ce verbe agir. Comme autre exemple, je prends l’astrophysicien paraplégique Stephen Hawking, qui, depuis les années 2000, communique et pilote un ordinateur grâce à un système mesurant les frémissements du muscle de la joue. Il a écrit plein de bouquins et fait des découvertes sur les trous noirs dans l’espace. Il arrive à sortir sur l’ordinateur cinq mots à la minute. Alors, est-ce que cela s’appelle agir ? Il produit de la connaissance, mais il ne fait que penser. La notion d’action dans son cas n’existe pas et on ne peut pas tout à la fois dire qu’il n’agit pas.
► Dans le cas de Stephen Hawking, l’action n’est pas physique, mais il y a, par l’analyse des frémissements de la joue, une interprétation qui génère un effet agissant.
► Le dictionnaire Larousse donne comme définition du mot « agir » : « C’est un fait, une faculté d’agir qui exprime sa volonté en accomplissant quelque chose par opposition à la pensée ou à la réflexion. Se mettre en action, c’est réaliser un acte et être conscient de ce que l’on fait. » Donc, pour l’exemple de cet astrophysicien paraplégique, de par son niveau d’intelligence, il est conscient d’agir.
► Nous avons des pensées passagères, fugaces, puis il y a la pensée réfléchie, la réflexion dans un but précis. La première (la pensée passagère) est très près de la rêverie ; elle mobilise parfois l’esprit et il faut en sortir. Mais à partir du moment où l’on dirige sa pensée, on récupère la maîtrise. Alors, nous avons, par exemple, ce cas d’une personne qui tombe ; nous avons tout de suite (pour la plupart d’entre-nous) le réflexe d’aller vers cette personne pour l’aider. Mais si la chute est grave, alors peut-être ne faut-il pas tenter de relever la personne, pour ne pas aggraver son cas.
Donc nous avons une pensée/action immédiate, puis nous avons une pensée/action réfléchie.
► Parler, c’est l’action de la pensée ; encore faut-il avoir les outils nécessaires pour exprimer cette pensée.
► Réfléchir, c’est analyser une situation, peser le pour et le contre en vue de faire quelque chose au mieux.
Revenant à l’aide spontanée à une personne qui tombe, c’est une pensée réactive. C’est comme si on était tombé soi-même ; on porte secours à cet autre moi, c’est instinctif, c’est un réflexe empathique.
► Dans la plupart des cas, on se dit qu’il vaut mieux penser avant d’agir, mais les deux sont complémentaires. Parfois, le temps de la réflexion n’est pas donné ; il faut agir dans l’urgence. Par exemple, dans le cas d’une personne qui se noie sous nos yeux ou d’un incendie, on est dans la pulsion ; on y va carrément ! Mais si on attend ne serait-ce qu’un peu, si on réfléchit un instant, on n’y va pas !
Dans un tout autre domaine, moins rationnel, l’amour, la réflexion n’a pas sa place, mais parfois il faut pourtant choisir entre deux options. L’amour entre un homme et une femme est souvent irrationnel, non raisonné ; on ne réfléchit pas pour tomber amoureux (ou amoureuse). On ne se dit pas : « Tiens ! Il serait bien pour moi ! » Les sentiments, l’impulsion, priment sur la réflexion, sur la pensée raisonnée, et là, on y va, même si on doit faire taire une petite voix qui nous dit qu’on fait peut-être une bêtise.
(A SUIVRE)
Extraits de restitution d'un débat du café-philo
Avec nos remerciements