Regards philosophiques (229)
Thème :
« L'intelligence artificielle
va-t-elle nous dominer ?»
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► Nous sommes dans un sujet qui a fait les beaux jours de la science-fiction et de la littérature fantastique, comme Frankenstein, où la créature risque de dominer son créateur. Isaac Asimov, auteur bien connu de science-fiction, a beaucoup écrit sur les robots et a fixé les trois lois de la robotique, qui sont :
1) Un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni en restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé à un danger.
2) Un robot doit obéir aux ordres qui lui sont donnés par un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi.
3) Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la première ou la deuxième loi.
L’I. A. ou les robots resteront des outils dominés par l’homme. Ensuite, tout dépend de l’utilisation, car cet outil va permettre de démultiplier la puissance humaine. Cela donne aussi de la puissance dans le domaine commercial, économique et dans le domaine militaire, avec puissance et rapidité d’action.
Alors, y a t-il des garde-fous ? On pense à Big Brother et au risque quant à nos données privées. Heureusement, il y a la CNIL et d’autres organismes de contrôle pour surveiller cette emprise.
► Quelques fois, les films de science-fiction nous emmènent dans des domaines qui ne seront jamais la réalité, mais parfois ils devancent une réalité, ce qui à terme ne sera plus de la science-fiction.
Ce sujet de débat, qui laisserait à penser qu’on s’intéresserait plus à la fiction qu’à la philosophie, est en fait un des thèmes qui nécessiterait le plus de débats, et ceci à tous les niveaux de notre société. Le sujet est d’ordre social, philosophique, d’ordre axiologique, c’est-à-dire mesurant la prise en compte des valeurs morales, d’ordre métaphysique et d’ordre politique.
A ce jour, c’est surtout une certaine exaltation, un émerveillement face aux développements numériques qui nous apportent de l’aide, du confort, de formidables moyens de communication, une contraction du temps, nous donnant le sentiment qu’en vivant plus vite nous vivons plus.
Mais qui s’intéresse un peu aux dernières recherches, aux toutes récentes applications, ne peut pas ne pas être quelque peu inquiet. Nous sommes « entre espérance et inquiétude », comme disait Jean Rostand en 1962 au sujet de l’ADN.
Sans tomber dans l’alarmisme, le sujet est grave, non seulement en regard du vivre ensemble, des plus sérieux d’un point de vue philosophique, mais essentiellement grave aussi d’un point de vue politique.
En effet, si l’on consulte la liste des magnats qui financent ou qui dirigent la recherche dans le domaine de l’intelligence artificielle, ceux qui se réclament de la philosophie transhumaniste, nous y trouvons de dangereux individus, presque tous des libertariens, qui, suivant la définition, souhaitent la suppression des États, que la liberté individuelle prime sur les libertés collectives, ce qui conduit à la suppression des diverses solidarités.
Le n° 83 d’octobre 2014 de Philosophie magazine cite des noms de personnes dirigeant de groupes, tels : Google, Amazon, Paypal, Wikipédia, liés directement ou participant au financement de laboratoires de recherches en neurosciences, en cybernétique.
Ces transhumanistes nous disent que l’intelligence artificielle nous permettra non seulement de vaincre la faim dans le monde, mais aussi de sauver la planète, vaincre la maladie et accéder à l’immortalité. Mais ils laissent à penser que ce ne sera pas forcement pour tous et qu’il faudra bien en laisser quelques-uns sur le bord de la route. Le but est de dépasser l’humain, de dépasser homo sapiens, de créer la nouvelle arborescence de l’humanité.
La crainte est aussi dans une exigence de plus en plus grande de la performance. Les entreprises, face à une concurrence redoutable, peuvent être amenées à embaucher des hommes aux capacités augmentées, dotés de puces mémorielles, de logiciels intégrés, leur donnant des capacités supérieures et une terrible efficacité, ou encore des cyborgs, ou robots performants que s’arracheront les entreprises. Le robot pourra remplacer de nombreux emplois. Le robot travaille 24 heures sur 24. Selon un article paru dans le supplément du journal Le Parisien du 12 décembre 2014 : « Il peut porter jusqu’à une tonne, l’homme maximum 100 kg. L’homme peut lire 70 pages en une heure, le robot, lui, lit et mémorise 300 millions de pages en une heure. [...] Dans nos pays occidentaux, un ouvrier coûte 11,60 €/h, le robot 3 €/h. » Le robot peut même fabriquer des robots. Il n’a pas de revendications, il n’est pas syndiqué, ne prend pas de congés maternité, il n’est pas soumis aux charges sociales et, de plus, il ne se suicide pas.
Extraits de restitution d'un débat du café-philo
Avec nos remerciements