Regards philosophiques (244)

Publié le par G-L. P. / J. C.

Thème :
« La femme est-elle l'avenir de l'homme ? »
 
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Introduction (suite) :
Une autre question (la 3ème):
Y a t-il une façon de penser spécifique, féminine ou masculine ? Michèle Le Doeuf, docteure en philosophie, a mis en place il y a longtemps (en 1978) à l’Ecole Normale supérieure de Fontenay-aux-Roses , c’est-à-dire dans l’institution philosophique, un séminaire «  Cheveux longs, idées courtes »  pour réorienter la recherche philosophique en expliquant : « Qu’en dépréciant les femmes, en les condamnant à n’être qu’un simple objet de réflexion, et non pas des sujets philosophiques, voire en les excluant, la philosophie « échoue à tenir sa promesse fondamentale de constituer une rationalité- en- commun » alors qu’elle prétend penser ce qui est commun et universel ». Son livre « L’Etude et le rouet » est son alerte pour réorienter la pensée philosophique. Ce n’est qu’un début. En effet, dans l’histoire de la philosophie occidentale, les femmes sont des inspiratrices ou/et, les boites aux lettres ou des confidentes, elles n’apparaissent, comme sujets philosophiques, comme des auteures, qu’au 20ème siècle avec Simone de Beauvoir, Simone Weil, Hannah Arendt.
Du 4ème siècle av. J.C. au 20ème siècle, les philosophes occidentaux ont perpétué les préjugés de leur époque liés à la situation sociale. Avec, à ma connaissance, une exception Epicure (au 4ème  siècle av. J.C.) qui acceptait les femmes dans son jardin au même titre que les hommes. Platon, et d’autres ont certes, conçu des sociétés avec égalité des rôles et des statuts entre hommes et femmes, mais seulement comme des utopies  Ils se sont rarement  exprimés sur la différence des sexes  et quand ils l’ont fait, c’est en considérant la différence sexuelle comme hiérarchisant les femmes comme inférieures et les hommes comme supérieurs. Raisonner sur les différences entre  l’homme et la femme signifie prendre en compte la dimension sexuelle de la condition humaine, ce qui n’apparaît réellement qu’au 20ème  siècle, les philosophes parlant, jusque là, de la globalité de l’être humain.
Pourquoi les femmes philosophes  prennent-elles encore peu la parole ?
D’abord parce que la prise de parole, est encore difficile dans  une société où les hommes dominent socialement et aussi parce que les femmes sont, (comme l’analysent deux philosophes Vinciane Despret et Isabelle Stengers dans leur livre), des « faiseuses d’histoires ». « Refusant la position d’infériorité jusque là acceptée, elles développent une forme subversive de penser pour s’affirmer, qui les isolent ou les font  critiquer comme des faiseuses d’histoires », agressives, voire  hystériques.
Une autre question (la 4ème) :
Faut-il se battre pour l’égalité des sexes ou pour l’égalité de tous les genres ? Les études sur « le genre » c’est à dire  ce mouvement, né aux Etats Unis, dans les années 1990, avec entre autres, Judith Butler qui a écrit, en 1990 « Trouble dans le genre »,  reprend la thèse selon laquelle la féminité, comme la virilité, sont des comportements socialement et historiquement construits. Comme l’a écrit Simone de Beauvoir dans « Le Deuxième sexe », «  on ne naît pas femme, on le devient »  Elle a écrit ce livre  pour que les filles et les femmes ne subissent plus les comportements et les attitudes sexistes comme un destin. Judith Butler et les disciples  de ces études sur le genre ont voulu aller plus loin  et affirmer que les êtres humains naissent neutres et doivent pouvoir choisir leur identité sexuelle, hétérosexuel homosexuel, bisexuel, transsexuel. Il y a un  bon livre  de la philosophe Bérénice Levet « La théorie du Genre ou le monde rêvé des anges » (2014) ; qui développe l’argumentation selon laquelle le nouvel Evangile du Genre, porteur de la bonne nouvelle que le féminin et le masculin peuvent être déconstruits, est une nouvelle mouture d’un puritanisme qui se dit progressiste et qui simplement dénie la réalité. Certes le machisme est partout inscrit dans nos us et coutumes, et dans nos réflexes, mais  certains gestes restent ceux des femmes ou des hommes. Il y a des comportements et des attitudes féminines et d’autres masculines, comme, par exemple, la séduction ou la courtoisie, qui se manifestent différemment historiquement parlant, mais qui subsistent malgré l’histoire. Nous ne fonctionnons pas de manière identique. Nos désirs ne peuvent se confondre.   Doit-on alors continuer de  parler de nature féminine  et de nature masculine malgré tout ?  C’’est là ma 5ème question.

 

                                                                      (A SUIVRE)
Extraits de restitution d'un débat du café-philo
Avec nos remerciements

Publié dans culturels

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