Roman : "Demain, fera-t-il beau ?" (32)

Publié le par M. P.

Roman :
"Demain, fera-t-il beau ?"
                                                        
                                                       Martine POUTOU
 
32
 
Il y avait ce petit homme qui ne sortait jamais sans son chapeau, cette dame âgée couverte de plusieurs couches de vêtements hiver comme été et qui, d’après son apparence, laissait penser qu’elle avait dû être très belle dans le passé.
Il y avait aussi ce gros bonhomme qui montait péniblement le chemin pentu, s’arrêtant de temps à autre pour reprendre son souffle, et cette jeune mère accompagnant son petit blondinet à l’école.
D’autres, moins identifiables, laissaient Ambre plus ou moins indifférente. Parfois, elle croisait un jeune homme qui avait su captiver son regard tant elle le trouvait plein de charme.
Lorsqu’elle l’évoquait elle disait :
Le prince aux yeux revolver, dixit la chanson de Marc Lavoine. Ce qui amusait beaucoup Jeanne.
- On peut toujours rêver ! Répondait-elle affectueusement.
Elle rêvassait, il est vrai, comme toutes les jeunes filles de son âge. Et quand le romantisme venait flirter avec le blues, elle prenait son air nostalgique, rêvant à son prince charmant. Alors, elle s’inventait de nouvelles mélodies, parant le vide de strass et de dentelles.
Lorsque le réel se fait morose ou trop compliqué à vivre, le rêve peut parfois égayer votre vie qui s’évade alors vers de nouvelles contrées où l’horizon se farde de rose poudré et vous donne bonne mine.
Les lundis où elle l’avait croisé la mettaient de bonne humeur pour la journée.
Alors, quand jeanne la rejoignait à Saint-Gaudens, elle savait dire, à son air enchanté, si elle avait vu ou non « son Prince ».
Elle lui disait en riant :
- La prochaine fois, demande-lui s’il n’a pas un frère jumeau ! Si c’est le cas, alors, présente le moi !
Ce matin là, alors qu’elle s’apprêtait à prendre le funiculaire, elle le vit emprunter le sentier.
Elle décida d’en faire autant pour avoir le plaisir de le croiser dans la descente.
Sur le chemin désert de ce petit matin frileux, elle ressentit une bouffée délirante envahir son corps et, malgré le trac et le rose aux joues qui trahissaient sa timidité passagère, elle osa l’aborder :
- Bonjour ! Excusez-moi, auriez-vous l’heure, s’il-vous- plaît ?
Hésitant, il sortit maladroitement son téléphone portable de la poche intérieure de son blouson de cuir bleu marine :
- 6 heures 58 précisément !
- 6 heures 58 ! Reprit-elle. Oh, merci beaucoup. Au revoir et bonne journée. 
- Au plaisir ! Ajouta-t-il en la regardant filer.
Son cœur battait à tout rompre et elle s’était littéralement enfuie.
                         
(A SUIVRE)

Publié dans culturels

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article