Regards philosophiques (260)
Thème :
« Qu'est-ce qu'être riche ? »
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► Il faut distinguer pauvreté et misère aujourd'hui dans la société française aujourd'hui l’écart est grand entre les riches, les pauvres et les misérables : du point de vue matériel, quelques chiffres : 2,5 millions de personnes touchées par l'illettrisme soit 7% de la population - 10,5 % de chômeurs – 1 million de personnes bénéficient des repas des restos du cœur - 3,6 millions de SDF – 1 personne sur 5 n'a pas d'accès Internet à son domicile - 8,5millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté (13,9%). Le seuil de pauvreté, en France était de 987 euros en 2014, tandis que 2,2 millions sont millionnaires et 67 personnes sont milliardaires.
Le vide idéologique de ces dernières décennies a laissé place, à un projet de société partagé par un nombre grandissant : « faire de l’argent » ; l’argent est le moteur de l’histoire humaine du 16ème siècle à nos jours, c’est à dire dans la période de mise en place du système capitaliste.
L’argent est devenu une valeur d’échange quand il a perdu sa valeur d’usage. Et alors règne dans toutes les sociétés à mode de production capitaliste, ce que Marx nomme « le monothéisme de l’argent ». Nous faisons l’expérience chaque jour de la domination, dans notre type de société, de la religion de l’argent.
Et finalement c'est Jean-Jacques Rousseau qui analyse le mieux ce en quoi consiste la richesse. Être riche c'est avoir quelque chose en sa possession mais ce n'est pas être propriétaire comme il l'écrit dans « Le discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes» : « Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, que de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : Gardez-vous d'écouter cet imposteur; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne ». Ce n'est pas l'argent mais la propriété privée et l'appropriation des biens (et notamment des biens communs) qui est la cause de tous les maux
Finalement si je m'interroge sur ce qui pour moi a de la valeur et non un prix, alors je dirai :
La richesse du genre humain c'est d'avoir su, au cours de son évolution, inventer toujours de nouveaux outils pour s'adapter à son environnement et le transformer pour satisfaire ses besoins et pour le connaître tout simplement ; la richesse c'est d'appartenir à une humanité qui sait calculer aujourd'hui l'existence de la neuvième planète du cosmos.
Ma richesse liée au hasard de ma naissance c'est d'être née et de vivre dans un pays dont le régime politique est une démocratie qui, en principe, adhère à la déclaration universelle des droits de l'homme et à la laïcité Mais elle est fragile et il faut être vigilant à ce qu'elle ne se disloque pas c'est peut-être l'alerte donnée par les « nuits debout ». Et en tant que femme ma richesse c'est de vivre dans une société où des lois (qui peuvent évoluer) relèvent du principe de l'égalité des droits des hommes et des femmes. Finalement être riche ce n'est pas avoir quelque chose à vendre c'est avoir quelque chose à donner ou à transmettre sans faire de calcul, sans en attendre un bénéfice. La richesse c'est de pouvoir partager.
► Il y a des richesses qui ne sont pas forcément matérielles ; je pense aux périodes où l’on achetait les esclaves en Afrique, ceux-ci appartenaient à des peuples riches de traditions, de principes moraux, et d’une spiritualité. Vendus aux colons certains ont gardé des traces de cette richesse, qui reste même dans une culture multiple aujourd’hui.
Maintenant pour la richesse matérielle, je la vois naître au néolithique avec les débuts de l’agriculture et de l’élevage et de la sédentarisation, ceci du fait de devoir stocker les produits de la culture. D’où aussi des sources de conflits où les moyens de l’intelligence ou la force font l’un plus riche, l’autre plus pauvre. C’est la naissance des couches sociales, de la richesse.
► J’ai dit que la richesse c’était d’être au-dessus de la moyenne, et quand on s’écarte de cette moyenne, on est plus ou moins riche ou on est plus ou moins pauvre. On peut faire des strates dans la richesse, comme dans la pauvreté. Dans la richesse, nous avons l’abondance, et le superflu jusqu’au gaspillage. Finalement reste la question d’où vient la richesse, et sont-ce toujours des richesses bien acquises ?
Lorsque on a évoqué la solidarité comme richesse, aujourd’hui elle passe par le partage constitué par l’impôt, et nous voyons le refus du partage avec aujourd’hui les « Panama papers » et les paradis fiscaux.
Nous avons eu ici à Chevilly-Larue un très gros propriétaire, fermier général (collecteur d’impôt), Barthélemy Couanar, qui avait de nombreux domaines et qui vivait au quotidien dans une extrême avarice.
Et aujourd’hui on mesure la richesse des peuples, des Nations avec le PIB (Produit Intérieur Brut) pendant que d’autres pays mesurent le BNB (Bonheur National Brut) comme au Bhoutan, et les habitants ont un bonheur brut très supérieur. Donc, il existe pour mesurer les richesses d’autres facteurs que les facteurs économiques.
(A SUIVRE)
Extraits de restitution d'un débat du café-philo
Avec nos remerciements