Retour vers mon enfance (20)

Publié le par B. B.

Johanna.

La poussière, accumulée pendant l'été, a été lavée par l'orage d'hier. La formidable palette de couleur de Dame Nature semble plus éclatante ce matin. Nettoyer le grenier ne me tente pas ; je vais aller saluer mon amie d'enfance, Johanna. J'emprunte l'ancienne ligne de chemin de fer reconvertie en chemin de promenade. De hauts talus plantés de noisetiers, de chênes et de châtaigniers me protègent du vent. Les branches hautes se rejoignent pour former une voûte qui fait écran aux rayons du soleil. Le sol est troué de multiples nids de poule que l'eau a envahi. Les fougères portent encore les toiles d'araignée de la nuit. Un tracteur peine au loin.

Je me souviens avec nostalgie de ma première rencontre avec toi, Johanna. Nos parents s'étaient perdus de vue pendant quelque temps puis ils s'étaient retrouvés. C'est là que nous avons fait connaissance. Nous avions le même âge : sept ans. Ton sourire éclatant, tes yeux bleus dans lesquels les images se reflétaient comme dans l'eau claire d'une fontaine, ton teint clair, tes cheveux blonds coupés au carré, tout m'attirait. Nous avons aussitôt sympathisé. Très vite, tu es devenue mon amie, mon double, ma confidente. Notre timidité, notre sensibilité à fleur de peau, notre intérêt pour les mêmes choses, notre passion pour les livres, tout nous rapprochait.

A ma mémoire reviennent les parties de marelle ou de dominos, l'habillage des poupées au visage de porcelaine, les goûters dans les dînettes fleuries, les parties de cache-cache au milieu des bottes de foin odorant, les promenades à travers la campagne, les discutions interminables.... Notre enfance a passé si vite. Je me souviens avec précision de nos quatorze ans. Nous avons fêté notre anniversaire ensemble, nous n'avions qu'une semaine de différence. Puis Mai est arrivé avec son lot de grèves, de rebellions, de revendications. Nous avons mis les bouchées doubles en Juin pour rattraper le retard scolaire. Malgré tout, l'été qui a suivi fut, pour moi, plus beau, plus lumineux, plus prometteur que jamais auparavant. Nous étions devenues des adolescentes avec des rêves plein la tête. C'était aussi l'âge de nos premiers émois, de notre première boum. C'était l'époque des minijupes et des pantalons pattes d'éléphant. L'avenir nous appartenait. Que tout semblait simple alors !

Publié dans témoignages

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