D'un pain d'autrefois...

Publié le par A. B.

Ou de sa fabrication maison d'autrefois.

Ce beau pétrin que l'on bichonne et qui trône, aujourd'hui, à côté du vaisselier rustique, dans la vaste salle à manger, a servi, autrefois, à pétrir tous les mois le pain pour toute une famille de six personnes.

Perchée sur une caisse en bois, les yeux juste à la hauteur minimum, je me rappelle avoir souvent observé Lisa, la maîtresse de la ferme, sa blouse impeccable comme toujours, un tablier de devant noué autour de la taille, ses cheveux retenus en arrière par quatre barrettes. Méthodiquement et en y mettant tout son savoir faire, elle effectuait avec dextérité toutes les opérations liées à la préparation de ce pain.

Par avance, elle avait réuni, près du pétrin, tous les ingrédients nécessaires : la farine, l'eau, le sel, le levain qui donnait au pain un goût acidulé.

Pour commencer, elle pesait la farine à l'aide d'une « romaine ». Le dos courbé pour soulever la charge, deux doigts dans l'anneau de suspension, elle faisait glisser la tare le long du curseur répétant cette opération jusqu'à rassembler vingt à vingt cinq kilos de farine.  Le blé avait, bien sûr, été cultivé et récolté dans la ferme puis moulu au moulin du village.

Alors cette quantité de farine était versée dans le pétrin en faisant un puits au milieu pour recevoir successivement l'eau, le sel et le levain émietté. Quant toute la farine semblait déjà assez bien mélangée, Lisa enfonçait ses deux poings serrés dans la pâte... la « travaillait »... la frappait sur le fond du pétrin, rajoutait un peu de farine pour qu'elle ne colle pas, farinait aussi ses mains et recommençait à pétrir jusqu'à obtention d'une boule bien lisse.

Pendant ce travail, machinalement, du revers de sa main droite elle essuyait son front, relevait son tablier de devant et s'en essuyait délicatement les mains encore plutôt farineuses.

La grosse boule de pâte était ensuite recouverte d'un linge blanc et était laissée au repos dans le pétrin deux à trois heures pour laisser la levure faire son œuvre.

Progressivement, la pâte doublait de volume. Lisa, alors, divisait cette boule en quatre ou cinq pains qu'elle incisait de quelques entailles parallèles et les plaçait chacun sur une feuille de chou.

La feuille de chou allait protéger pendant la cuisson le pain de la cendre laissée par le feu précédemment allumé. Les côtes du chou, elles, laissaient de beaux dessins sous le dessous des pains cuits.

Ce pain de campagne avait une croûte épaisse et dorée ; la mie était bien levée avec de nombreuses alvéoles.

Quand le pain devenait trop rassis, il garnissait le fond d'une assiette creuse et s'imbibait du bouillon de légumes avec lequel la cuisinière l'arrosait avantageusement. Le soir cela remplissait nos estomacs d'enfants !


Publié dans témoignages

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