Retour vers mon enfance (29)
Les grandes vacances étaient des moments privilégiés pour tous nos jeux. Juste avant, une fête clôturait une année scolaire studieuse. Nous nous produisions dans la salle des fêtes du village. C'était pour nous l'occasion d'offrir aux parents un échantillon de nos talents et de notre travail assidu. Tous en chœur, nous chantions, sous la direction de la maîtresse, les « colchiques dans les près », « le fameux trois mâts fin comme un oiseau », « à la claire fontaine, m'en allant promener », « alouette, je te plumerai »...Puis, il fallait s'appliquer tant qu'on pouvait pour jouer des saynètes et mimer des fables. Et s'il y avait quelques erreurs et gestes imprévus, le public indulgent manifestait encore plus de joie.
Une troupe de théâtre amateur nous proposait un spectacle en seconde partie de soirée. Je me souviens plus particulièrement d'une pièce de Georges Sand : « La mare au diable ». L'histoire, le jeu des acteurs, les textes, les décors, les lumières, tout nous captivait : le feu de bois qui crépite au milieu de la scène, le vent qui souffle et qui hurle dans les rideaux, le tonnerre qui gronde, la chouette qui hulule, Germain le laboureur, veuf avec cinq enfants, obligé de passer la nuit près de cette mare lugubre en compagnie de la douce Marie. Tout était réuni pour nous faire frissonner......
Dès le lendemain, avec les copains et les copines, nous nous sommes
retrouvés pour commenter cette merveilleuse soirée. Et, si nous aussi, nous montions notre propre pièce de théâtre. Nous avions toutes les vacances pour la préparer. La grange des
voisins avait été rapidement aménagée : des planches posées sur des bottes de foin offraient une scène branlante mais acceptable. De vieilles bâches usées, suspendues à un fil de fer,
faisaient office de rideaux. Les décors étaient presque inexistants. Par contre, nos costumes étaient étonnants : sacs de pommes de terre en jute, rideaux déchirés, habits récupérés dans
les vieilles malles des greniers, chapeaux empruntés à l'épouvantail du verger, plumes arrachées à la volaille de la basse-cour, etc....Les textes étaient tous improvisés et changeaient à
chaque répétition. Les plus jeunes enfants étaient les spectateurs.
Nous ne sommes jamais allés au bout de la pièce, mais nous nous sommes beaucoup amusés. Et j'en garde un souvenir merveilleux. Je fais partie, à mon tour, d'une troupe formidable et
quelle belle récompense pour nous, de donner du plaisir aux spectateurs et de susciter des vocations chez les enfants !!!!