Retour vers mon enfance (30)

Publié le par B. B.

Les cochonnailles... 


Ma promenade est presque achevée. J'aperçois les tuiles, aux teintes douces et rosées, des premières maisons. Parfois, le soleil perce la croûte des nuages  quelques minutes avant de disparaître furtivement. Sur un rebord de fenêtre, un chat s'applique à faire sa toilette. Une porte ouverte laisse entrer l'air gorgé d'odeurs automnales. Je longe maintenant les vieux bâtiments, aux pierres grises, où les fermiers élevaient des cochons destinés à leur consommation.

Quand l'animal atteignait une taille et un poids respectables, on fixait le jour de son sacrifice.  Tôt le matin, on entendait les hurlements du goret qu'on égorge. Le sang était promptement récupéré dans des bassines. Puis les hommes couvraient la bête de paille qu'ils enflammaient. L'odeur du porc grillé se répandait dans la ferme : impuretés et soies étaient brûlées.  Et des seaux d'eau chaude étaient ensuite jetés sur la couenne fumante qu'il fallait alors gratter minutieusement.  Enfin, on attachait le cochon sur une échelle pour lui ouvrir le ventre et le découper.

Pendant ce temps,  la maison ressemblait à une vraie fourmilière.  Le voisins et les amis,  venus aider,  s'affairaient. Les uns aiguisaient les couteaux, d'autres nourrissaient le feu sous la grosse marmite, les femmes lavaient et récuraient les casseroles et les bocaux. La cuisine était encombrée de plats, de pots et de bassines. C'était un vrai remue-ménage dans toute la demeure. Les boyaux, soigneusement rincés, se remplissaient de chair à saucisses ou de boudin. Une fois terminés, ils formaient une magnifique spirale qu'on suspendait ai plafond. Ils attendaient là de raffermir avant d'être partagés entre les gens venus aider.

Une odeur pénétrante de viande et d'oignons frits planait sur l'ensemble. Les bocaux, garnis de viande et de pâté, attendaient d'être stérilisés. Les rôtis étaient mis dans la graisse dans des pots en grès. Les terrines, les pâtés de tête, les andouilles, les abats, les filets, les confits,les saucissons,  tout cet amoncellement de cochonnailles était cuisiné dans une ambiance joyeuse. Il fallait aussi préparer les jambons pour qu'ils sèchent. A la cave, la saumure était prête et les saloirs commençaient à être pleins.

Tout ça sentait terriblement bon les provisions pour l'hiver. C'est hélas aujourd'hui une tradition qui a tendance à disparaître.  Et pourtant, qu'ils étaient bons les pâtés qu'on étalait sur les grosses tranches de pain de campagne et qu'elles étaient savoureuses les fines tranches de jambon qu'on mangeait avec gourmandise.......

Publié dans témoignages

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