Les Pipelettes (33)

Publié le par B. B.

 

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Chère Arlette,

 

Cela fait bientôt une semaine que je suis partie, en urgence, au chevet de mes parents âgés. Je t’avais promis de te donner des nouvelles mais je n’ai pas trouvé un instant de libre. J’ai essayé de t’appeler mais ça sonne sans arrêt occupé. Quelle pipelette ! Et sur ton portable, je tombe sur ta messagerie. Ca t’arrive de l’allumer de temps en temps ?

Qu’à cela ne tienne, je vais me débrouiller autrement. J’ai bien pensé au pigeon voyageur mais je n’en ai pas sous la main… Tu sais, autrefois, on ne disposait pas de toutes ces technologies modernes pour communiquer. Et pourtant, ça marchait quand même.

J’ai retrouvé quelques feuilles à lettres au fond d’un tiroir, dans ma chambre d’adolescente. Le papier rose est fané et il a perdu son parfum, mais il fera très bien l’affaire. J’ai remis une cartouche dans mon vieux Waterman, et la plume gratte un peu. Mais ça me rappellera le bon vieux temps ! Tu te souviens, au collège, on nous obligeait à écrire avec un porte-plume et de l’encre violette. Il fallait bien former les lettres en écriture anglaise. Et gare aux taches qui formaient de gros pâtés hideux au milieu de la page : le buvard n’absorbait pas tout, et les coups de gomme que l’on mouillait du bout de la langue laissaient des traces sombres sur la feuille, et parfois, on arrivait à faire un beau trou à force de frotter… Oh, là, là, elle n’était pas vraiment ravie la prof de français. Aujourd’hui, c’est quand même plus facile avec les stylos.

Je ne sais pas si tu te souviens, mais c’est avec ce même papier que je t’écrivais pendant les vacances. Tu partais régulièrement chez ta grand-mère vers Besançon. Et nous échangions des lettres interminables. Nous étions déjà de véritables pipelettes. Tu me racontais tes premiers émois, ton nouveau 45 tours des Stones, tes boums au son du disco, tu me parlais de tes superbes pantalons patte d’éléphant qui allaient trop bien avec tes chaussures à semelle compensée… A mon tour, je te causais avec passion du beau garçon, trop cool, qui venait en vacances chez les voisins, je te vantais la super mini jupe que ma mère avait enfin accepté de m’offrir, je te narrais la sortie en famille à Royan ou le feu d’artifice du 14 juillet suivi du bal au son de l’accordéon.

Et dire que ça fait déjà quelques décennies. C’était dans ton temps, comme disent les jeunes. Ah ! Ma pauvre Arlette, tout ceci ne nous rajeunit pas…

J’arrête pour aujourd’hui, il faut que je parte à l’hôpital. Tu me manques. J’essaierai de t’écrire tous les jours, ça me fera du bien.

Bisous.

 

Claudine

 

PS : Est-ce que tu pourras distribuer les petits journaux de l’association pendant mon absence ? Et n’oublie pas le Tougaya même s’il n’y a toujours pas d’escalator…

 

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