Regards philosophiques (46)
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Thème : « Est-il sage d'avoir confiance ? »
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/ Dans son œuvre « La filiation de l’homme », Darwin nous explique en quelque sorte que la confiance fut comme une loi transcendantale incontournable pour la création de notre structure sociale. Nous avons dû faire confiance par nécessité, laquelle est devenu instinct, ce que Darwin nomme « instinct social ». C’est parce que dans cette nature nous étions les plus faibles, que nous n’avions pas le choix, qu’il a fallu agir ensemble en confiance, pour survivre. Et là, la vie fait alors confiance non pas aux plus forts, comme on le dit trop souvent, mais aux plus aptes à la confiance, pour créer un groupe homogène. La vie n’a qu’un but, prolonger la vie, et elle choisit, elle fait confiance dans l’adaptabilité sociale. Ce qui pourrait nous montrer qu’une société où l’on a de moins en moins confiance, où l’on se défie de tout, où on s’assure contre tout, où on fait des contrats pour tout, une société où l’on sent monter chaque fois un peu plus les individualismes, une société qui perd confiance en sa capacité à construire ensemble, sera peut-être en train de faire le chemin à l’envers, aller vers sa fin. Autrement dit, la confiance est une loi suprême non écrite, c’est tout le ciment de la société : vivre, c’est faire confiance.
/ Pour moi, la confiance, c’est une forme de crédit symbolique, qui à un moment ou un autre sera remboursé. On ne peut pas faire confiance à quelqu’un et ne pas espérer avoir aussi en retour une confiance. C’est cette forme de crédit qui rend la vie possible, la vie économique et sociale qui la structure dans le libre échange des ressources. Il ne faut peut-être pas confondre confiance et assurance. La confiance, c’est ce dont nous avons besoin, alors que nous ne pouvons pas avoir l’assurance de quelque chose. Alors pouvons-nous avoir une confiance aveugle et tout accepter sans poser de question ?
/ On a évoqué la confiance dans l’avenir. On peut ne pas avoir forcément confiance dans l’avenir, ni être en défiance. L’avenir nous réserve de bonnes choses et cette pensée nous aide à avancer, à nous battre. Même dans des situations de maladie grave, il faut cette confiance pour vaincre le mal.
/ Si on n’espérait pas du bon dans l’avenir, autant se suicider tout de suite !
/ Plus que la sagesse, c’est la prudence qui doit présider à la confiance.
/ On a essayé les voies : « est-il sage », « est-il raisonnable », et, si nous évoquons la prudence, on revient vers la « prudencia » des Romains et la « phronèsis » des Grecs, nous revenons aux sources des philosophies. L’extrême prudence de ces derniers excluait pratiquement l’idée de confiance et toute spontanéité.
Par ailleurs, on a évoqué des situations, où il faut se défier de trop de confiance pour ne pas « tomber de haut ». C'est aussi sagesse de ne pas trop s'illusionner sur le lendemain, mais, fort heureusement, « le pire n’est jamais sûr ! »
/ Un des axes importants, c’est déjà la confiance en soi. Mais, je ne pense pas qu’il y ait des gens qui ont une totale confiance en eux-mêmes. Ceux qui montrent une confiance excessive, sont souvent des personnes qui manquent de confiance, c’est une façade. Acquérir de la confiance en soi, c’est quelque chose qui se travaille, qui se structure, quand on arrive à avoir une légitimité. Se faire confiance est peut-être ce qu’il y a de plus difficile au monde. La fausse confiance en soi se ressent, et génère alors de la méfiance.
Ensuite, au niveau sociétal, c’est vrai que la société actuelle marche sur la confiance au niveau économique. Nous avons tous (plus ou moins) des billets dans les poches, ce qu’on appelle, monnaie fiduciaire, du latin « fiducia » (confiance), mot dont la racine est « fides » (foi). Nous savons tous que ce n’est que du papier. La monnaie qui fut basée sur une valeur or, n’est plus maintenant qu’un crédit sur l’économie, c’est le ciment de cette société. Si la confiance tombe, c’est le monde financier et toute l’économie qui s’écroulent.
/ La confiance en moi que j’ai pu acquérir, je la dois déjà à ceux qui m’ont fait confiance, dans mon travail, par exemple.
/ Pour moi, la confiance n’est ni naïveté, ni utopie. La confiance, parfois, c’est aussi du courage, le courage d’affronter l’avenir.
(A suivre)
extraits de restitution d'un débat du café-philo
http://cafephilo.over-blog.net/
avec lequel je garde un lien privilégié
en tant qu'un des artisans de sa création.