Regards philosophiques (92)

Publié le par G-L. P. / J. C.

 

 

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Thème :

  « Tolérance et laxisme sont-ils opposés

ou sont-ils opposables ? » 

  

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Débat :

     

 

► Nous nous trouvons parfois face à des personnes qui refusent la norme, ou les normes, c’est-à-dire que leur sentiment est qu’on ne peut enfermer une valeur, un individu dans un cadre précis. Nous retrouvons là cette doctrine morale et philosophique, « le laxisme », tendant à supprimer les interdits. Ceux qui veulent qu’on respecte la norme, les normes, sont traités  d’intolérants par ces derniers, et inversement, ceux qui ne veulent pas que soient abolies, bousculées les normes considèrent les opposants aux normes comme des laxistes. Dans notre société, cela touche divers domaines, et bien sûr nous n’avons pas un avis unanimes sur ces questions. Quelques exemples :


- Ce sera le mariage, valeur, institution, que certains considèrent uniquement comme « l’union d’un homme et d’une femme », au nom de la tolérance pour les uns. Au nom de  cette même tolérance les Espagnols ont modifié leur constitution pour inscrire le mariage comme : «  L’union de deux individus ».


-  Ce sera la dépénalisation de certaines drogues, comme l’ont fait les Hollandais aux Pays-Bas, pays où l’on peut aller fumer son « pétard » et faire le plein dans un coffee-shop auprès des dealers officiels.  Faut-il autoriser, comme l’ont fait les Espagnols, la consommation tout en continuant de se plaindre des méfaits, des morts, dus à cette tolérance ? Dans ce pays, la consommation est autorisée et la vente interdite, ce qui est assez paradoxal. Là, nous nous retrouvons toujours avec les mêmes jugements de tolérance ou de laxisme.


- Ce sera les mères porteuses, dites aussi « ventres à louer », ou le désir d’enfant, ou même le pouvoir d’achat et la morale,  sont des sujets polémiques.


- Ce sera l’euthanasie, avec à la fois les risques de dérapages et parfois un peu d’hypocrisie.


- Ce sera ce récurrent débat sur les « maisons closes », sujet que reprennent les journaux dans les périodes creuses. Faut-il autoriser les établissements comme dans certains pays d’Europe, maisons qu’on appelle pudiquement des « clubs » ? Faut-il plus ou moins tolérer les réseaux de souteneurs qui droguent des jeunes femmes et les terrorisent ?


- Ce sera l’adoption des enfants par les couples homosexuels. Sujet très polémique.


Ce sont là des sujets de société d’importance qu’on doit pouvoir aborder sans tomber dans une tolérance proche du laxisme, sans tomber dans l’intolérance. Au sein d’une même famille, d’un groupe d’amis, d’un parti politique, les avis divergent, s’opposent parfois radicalement. Ces questions transcendent les appartenances; très vite viennent les sentiments de : tolérance – intolérance – laxisme. Le débat sur tous ces sujets reste très largement ouvert.


► Aujourd’hui, il y a une  question sur l’éthique. Peut-on tolérer la cruauté, la façon dont on traite les animaux – le vivant en général, la torture, la violence institutionnalisée, la persécution des minorités, les mutilations sexuelles ? On tolère quand même beaucoup de choses très graves, comme l’esclavage, la lapidation, le terrorisme. Le summum de la tolérance, proche du laxisme, c’est le politiquement correct.


► On a vu qu’en gros, la tolérance avait servi à éviter des conflits. Kofi Annam (secrétaire général des Nations Unies de 1997 à 2006) disait  que : « La tolérance est une vertu qui rend la paix possible ». Toutefois, à quoi abouterait une tolérance universelle et absolue ? Ce serait oublier les injustices, les victimes. Tolérer Hitler, c’est déjà se faire complice. Poussée à l’extrême, la tolérance finirait par se nier elle-même, car elle laisserait les mains libres à ceux qui veulent la supprimer. Du coup, la question se pose face à cela : que faire quand des parents refusent une transfusion sanguine qui pourrait sauver  leur enfant ? Doit-on agir avec un rapport de force, celui de la loi, ou en rester au dialogue ? En politique, est-ce qu’on doit interdire un parti qui a des idées totalitaires, racistes et antisémites ?


On  voit qu’il y a une difficulté énorme à être toujours tolérant. Seule une profonde réflexion de l’individu peut lui permettre « en son âme et conscience », d’agir en étant plus ou moins tolérant. Je dirai que tolérance et laxisme ne sont pas opposés, ils sont opposables, comme le sont le pouce avec les quatre autres doigts de la main. « Au cours des siècles, », nous dit Zola, « l’histoire des peuples n’est qu’une leçon de mutuelle tolérance ».

 

  
(A SUIVRE)

 

 

Avec l'aimable autorisation des animateurs, 

extraits de restitution d'un débat du café-philo

http://cafes-philo.org/

avec lequel je garde un lien privilégié

en tant qu'un des artisans de sa création.


 

 

Publié dans culturels

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