Regards philosophiques (150)

Publié le par G-L. P. / J. C.

Thème :

« Internet, un univers postmoderne ? »

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Débat  :

► Dans ce débat, j’ai l’impression qu’on est un peu parti sur l’analyse : qu’est-ce que c’est, et quelle est la caractéristique d’Internet ? Il y a un autre terme dans la question initiale, c’est l’aspect postmoderne, qui est, on l’a vu, parfois proche du concept posthumain. Il y a un risque, quand il n’y a plus d’échanges de paroles et d’idées, ni de débats, que l’humain disparaisse au profit de violences et de passages à l’acte. Si on devait avoir une troisième guerre mondiale, ce serait une guerre comme on en vu à la télévision, une guerre chirurgicale, une guerre numérique, froide et inhumaine ; plus de guerres sanglantes comme auparavant ; ce serait une guerre pulsionnelle, mais elle n’en serait que plus inhumaine.  Internet s’est développé au moment de la Guerre froide, avec le rôle important des Américains dans le contrôle de l’information et des données, et avec l’espionnage. A partir du moment où les Etats-Unis contrôlent tout ce système, nous nous demandons si nous ne sommes pas à la merci de cette puissance. Qui contrôle Internet, contrôle en grande partie nos vies. Cela pose la question de la souveraineté des peuples, et même de savoir si nous sommes encore en démocratie.

► Plus que la peur d’Internet, est ressentie  la peur de la prégnance d’Internet, de tous ces moyens de communication numériques. Effectivement, par rapport au temps qu’on peut consacrer aux échanges humains, c’est cela qui me ferait le plus peur. Internet est un produit addictif. On devient des bagnards des moyens de communication, on voit certains cadres qui ont cent mails à ouvrir le matin en arrivant au bureau ; avec tous les moyens numériques, le travail vous poursuit jusque chez vous. Internet n’est-il pas un moyen pour obtenir de plus en plus de productivité de l’être humain ? Et quelle part d’intimité nous reste-t-il ?

► Internet est un outil pour la transmission des connaissances, mais c’est un moyen et une technologie au service de l’humain, et pas une fin en soi. Le contenu de la pensée est plus important que le moyen pour le transmettre. De même que pour l’atome, Internet permet le meilleur comme le pire. Il n’est pas moral ou immoral en soi ; tout dépend de son usage.

► Quel est le rôle des Etats dans le contrôle d’Internet ? Il faut savoir qu’Internet a besoin de satellites et la structure qui gère ces satellites, c’est l’ONU. On pourrait penser que l’ONU pourrait fixer les limites…

► Il a été demandé à l’ONU de gérer et de contrôler que l’accès à Internet ne puisse être bloqué par un Etat. Lors des manifestations de Tian’anmen, le gouvernement chinois a bloqué l’accès à Internet. Normalement, l’ONU interdit cela ; néanmoins il y a des programmes, des logiciels qui permettent de contrôler et de bloquer le cas échéant l’accès à Internet ; les spécialistes de ces logiciels sont français et nous en avons vendu entre autres à Kadhafi, avant que le vent tourne… (Source : Emission: Une contre-histoire d’Internet. Arte. 14 mai 2013)

► Que pensez-vous de l’éducation avec les tablettes, et une E-éducation à terme peut-être sans professeur ?

► Sommes-nous en droit, devons-nous nous interroger, afin d’alimenter le débat, à propos de cette conception postmoderne de la société qui permet l’éclosion et l’accélération du tout Internet qui fait de nous des « Homo numéricus » ?  C’est en fonction de cette idéologie postmoderne du tout éclaté qu’Internet a pu se développer tel qu’on le connaît aujourd’hui, c’est à dire hors service public, dans la sphère marchande. En effet, à  aucun moment il n’est question, toujours à propos d’Internet, de gratuité, de transmission désintéressée du savoir. Lyotard se demande même, à propos de l’Université, si tous les savoirs doivent être financés ou si seuls ceux susceptibles d’avoir des résultats « immédiatement exploitables » doivent être en capacité de recevoir des aides publiques ? Comment combler le fossé numérique, l’exclusion des séniors ? Gérer un virtuel déstabilisant ?

La société postmoderne, telle que Michel Maffesoli la conçoit dans son ouvrage Le temps des tribus, fait état d’un retour au passé, au local, à l’importance de la tribu et du « bricolage » mythologique. Il dresse les principales aspirations de cette génération postmoderne du tout Internet : - l’hédonisme ou la recherche du plaisir immédiat, dans l’instant présent. A cet égard, il semble tout à fait possible de confronter cette aspiration de l’homme postmoderne établie par Maffesoli avec le comportement des internautes lorsqu’ils « zappent ». En effet, la vitesse à laquelle se propage la vie sur Internet, les changements et la multiplication des canaux d’information induisent des comportements de « zappeur », outre le fait que le cyber-consommateur est soumis à une multitude d’informations à la fois incontrôlées et incontrôlables. Internet offre cette possibilité d’accéder au plaisir immédiat et instantané de trouver en un clic ou deux ce qui est recherché.- Le tribalisme qui permet d’établir des liens communautaires non exclusifs et transversaux. Cette donnée comportementaliste invoque le retour au clan et ce, bien que le post-modernisme soit centré sur l’individu, le « moi ». L’individu moderne avait soif d’individualisme, l’individu postmoderne à soif de « moi » et de tribalisme. Maffesoli évoque ce retour aux origines comme la conséquence d’une perte de confiance dans les grandes structures sociales. Internet a permis ce regroupement social. Internet a permis le passage à la globalisation, à la mondialisation et, à son tour, cette globalisation, cette mondialisation a servi d’accélérateur à Internet.- Le nomadisme comme vecteur de structuration sociale qui a permis au postmoderne d’échapper à la logique de l’Etat-Nation. Que devient la vie privée dans cet univers de signes et de flux ? On assiste à une spatialisation sous la pression des capitalistes (capitalisme tardif).

(A SUIVRE)

Extraits de restitution d'un débat du café-philo

http://cafes-philo.org/

avec lequel je garde un lien privilégié

en tant qu'un des artisans de sa création.

 

Publié dans culturels

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